Quel héritage pour Federer ?
Tout allait bien, ou du moins tout semblait bien aller. Le tennis vivait ses plus belles heures de gloire avec les inattendues renaissances de Roger Federer et Rafael Nadal en 2017, puis celle de Novak Djokovic en 2018, les trois plus grands joueurs du vingt-et-unième siècle que l’on avait pensé un temps fini pour le tennis. Andy Murray et Stan Wawrinka voulaient connaître le même retour en 2019, et la nouvelle génération commençait enfin à poindre le bout de son nez avec Dominic Thiem et Alexander Zverev.
Côté français, même si les résultats en tournois laissaient à désirer, la victoire l’an dernier en Coupe Davis de l’équipe du magicien Noah avait redonné le sourire à une maison bleue vieillissante et aux Quatre Mousquetaires (Tsonga, Monfils, Simon, Gasquet) enfin titrés collectivement. Pourtant, en 2019, tout va changer dans le tennis masculin, car l’on ne sait pas encore si la révolution qui va toucher l’ATP va bientôt suivre du côté des femmes, même si cela paraît fort probable après l’annonce des premiers changements qui toucheront la Fed Cup en 2019.
Un divorce au plus haut qui fait mal au plus bas
Mais le vrai bouleversement est ailleurs, avec la mort pure et simple de la Coupe Davis, pour des raisons qui ont bien du mal à passer, surtout dans le clan français, qui s’est révélé être le pays le plus attaché à l’ancienne formule, même si la Fédération Française de Tennis a donné douze voix en faveur de la réforme contestée, malgré les désaveux publics des joueurs et du coach de l’équipe de Coupe Davis. Ce désaccord au sein de la maison tricolore traduit en fait une fracture bien plus profonde dans le monde du tennis en général, avec la mésentente entre les deux instances responsables du tennis dans le monde, l’ITF et l’ATP.
De son côté, l’ATP, qui représente les joueurs, avaient annoncé il y a longtemps déjà, sous l’impulsion de Roger Federer notamment, la création d’une véritable Coupe du Monde de Tennis, bâtie plutôt sur le modèle du football, c’est-à-dire sur une période de courte durée et dans un pays unique, sans pour autant remettre en cause le principe de la Coupe Davis. La date officielle dévoilée à l’époque était début Janvier 2020, en Australie. Cette compétition, bien que non-amicale puisqu’elle permettrait de remporter des points ATP, ce qui n’est pas le cas de la Coupe Davis actuelle, se déroulerait donc en tout début de saison, dans la zone géographique où se déroule la plupart des tournois du moment, et avant l’Open d’Australie donc.
Quand la finance prend le pas sur le sport
Déjà, certaines voix s’étaient un peu élevées pour se demander le véritable intérêt d’un tel tournoi, mais l’idée avait été dans son ensemble plutôt acceptée. On était en tout cas bien loin du tollé provoqué par la proposition de l’ITF, qui elle représente les fédérations, quelques mois plus tard. Une compétition en novembre ou septembre, donc quand les organismes des joueurs sont déjà bien entamés, et avec de nouveau l’idée d’un lieu unique et d’une courte période, pour satisfaire les marchés asiatiques. Mais sans avoir le soutien des joueurs de tennis, c’est ironiquement grâce à l’appui d’un joueur… De football, le Barcelonais Piqué, que le vote a été entériné et accepté par toutes les fédérations du monde en août dernier, proclamant par là-même la Coupe Davis à mort.
Shakira ne lui suffit pas…
En effet, il s’agit de l’actuel défenseur du Barça et d’un groupe d’investissements nommé Kosmos qui ont poussé pour faire passer cette réforme, dont l’objectif uniquement financier ne trompe personne, et surtout pas les joueurs français qui, eux, disputeront en novembre la finale de l’ultime vraie Coupe Davis, face à la Croatie, où ils seront favoris selon les spécialistes du tennis pour être la dernière équipe de l’histoire à soulever le trophée.
L’an prochain, avec les nouveaux affrontements entre Federer, Nadal, Djokovic qui nous régalent depuis plus de 10 ans, auraient pu s’annoncer comme une formidable année tennistique, mais des enjeux personnels et financiers d’acteurs étrangers à la petite balle jaune sont en passe de tout gâcher. Il y a fort à croire que le tennis ne sortira pas grandi des épreuves qui l’attend.
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Allan Kinic est le fondateur de l'agence Kinic. Expert en communication et marketing sportif, il anime régulièrement des formations et des conférences sur le sujet. Il accompagne les clubs, ligues et fédérations depuis de nombreuses années.